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… vu par Arlette

Xinran ♦ Funérailles célestes

L’extraordinaire aventure d’une chinoise au Tibet

Funérailles célestesShu Wen est une jeune chinoise originaire de Nankin. Elle fait ses études de médecine et décide de se spécialiser en dermatologie. À l’université, elle fait la rencontre d’un autre étudiant, Kejun, qui travaille aussi comme assistant de laboratoire. Ayant perdu toute sa famille pendant la guerre sino-japonaise, le gouvernement finance les études de Kejun qui est doux et gentil avec tout le monde. Il travaille dur et c’est un étudiant exceptionnel. L’armée ayant un besoin urgent de chirurgien, Kejun pense à s’engager. Il part et Shu Wen n’a aucunes nouvelles pendant deux années. À son retour, Kejun termine ses études et le jeune couple décide de se marier. Il a vingt-neuf ans et Shu Wen vingt-six. Le mariage est célébré mais seulement trois semaines plus tard, l’unité de Kejun est envoyée au Tibet. Shu Wen attend impatiemment son retour, mais elle reçoit une convocation au quartier général de Suzhou pour apprendre que son mari est mort dans un incident survenu à l’est du Tibet le 24 mars 1958, à l’âge de vingt-neuf ans.

Mais Shu Wen refuse de croire à la mort de Kejun. Elle décide de partir au Tibet pour tenter de le retrouver. L’armée ayant désespérément besoin de médecins, le diplôme de dermatologie de Wen la rend précieuse à leurs yeux. Elle part donc avec l’armée pour une quête qui durera une trentaine d’années pendant laquelle Wen sera recueillie par une famille de nomades tibétains avec laquelle elle vivra de nombreuses années en compagnie d’une amie tibétaine, Zhuoma, rencontrée dans l’armée et qui est elle aussi à la recherche de son amour disparu.

Après trente années d’errance, son opiniâtreté lui permet de découvrir ce qui est arrivé à son mari…

Quand Wen retourne finalement en Chine, elle retrouve un pays profondément changé par la Révolution culturelle et Deng Xiaoping. Mais elle aussi a changé : en Chine, elle avait toujours été poussée par le matérialisme ; au Tibet, elle a découvert la spiritualité.

L’histoire de Shu Wen, cette jeune médecin chinoise, devenue une tibétaine d’âge mûr, est véridique.

L’auteur Xinran, est journaliste à Pékin et anime une émission de radio lorsqu’elle rencontre, en 2003, cette femme extraordinaire qu’est Shu Wen. Elle recueillera ses confidences avant de la perdre de vue. Depuis ce temps, elle est à sa recherche et une émouvante lettre pour Wen accompagne le récit.

Cette histoire est tout simplement bouleversante. C’est le récit d’une femme habitée par la détermination inébranlable d’apprendre ce qui est advenu de son mari, son grand amour qu’elle n’a jamais oublié. Faisant preuve d’un courage et d’une ténacité hors du commun, elle parcourra pendant trente longues années le Tibet afin de retrouver les traces de son compagnon de vie. Pendant ce temps, elle découvre un pays dont elle ignorait à peu près tout des coutumes et croyances et devient peu à peu plus tibétaine que chinoise. Elle adopte les vêtements et la coiffure des femmes tibétaines et apprend à vivre à la mode des familles nomades du Tibet. Tous les soirs, elle écrit son journal et sort la photo de Kejun afin de bien garder en mémoire ses traits. Au fil des années, la photo a jauni mais le doux visage de son grand amour la rassure et la console de ses tourments.

Une bouleversante histoire d’amour avec pour toile de fond le Tibet à l’époque de l’invasion chinoise. Un document exceptionnel à lire absolument pour les amoureux de ce pays sauvage et rude qui abrite parfois de belles histoires de fidélité et de passion amoureuse.

 

Funérailles Célestes : Quelle est la coutume pour inhumer les morts au Tibet ?

Une coutume des plus exotiques, venue tout droit du lointain Tibet. Nommée « funérailles célestes », jhator en tibétain, consiste à exposer le corps des défunts sur le haut d’une montagne pour que les rapaces viennent le dévorer.

De plus, les Tibétains sont bouddhistes, philosophie qui prône la réincarnation. Selon eux, une fois la personne décédée, son âme va dans l’au-delà pour être ensuite réincarnée, alors que l’enveloppe de chair restée sur terre n’est plus qu’une simple coquille vide. Le fait de nourrir les rapaces avec cette chair est considéré comme un retour complet à la nature, le dernier don de soi de la part du défunt à la terre qui l’a fait naître.

Cependant, le jhator est une cérémonie très codifiée et chère. Les gens qui ne peuvent pas offrir la cérémonie proprement dite au corps du défunt se contentent de placer le corps sur des hauteurs afin que celui-ci soit dévoré par les rapaces.

Pour ceux qui peuvent se l’offrir, s’ensuit un véritable rituel. Il se déroule habituellement dans un monastère, tel que le monastère de Drigun. Le corps est placé sur une pierre plate qui sert spécialement à cet usage. Avant le rituel, un moine chante en tournant autour du corps et brûle des encens. Puis le corps est littéralement découpé par les Rogyapas (découpeurs de corps). La chair est séparée du squelette, pétrie puis mélangée à de la farine d’orge, du thé et du lait de Yak. Enfin les vautours sont appelés à manger. Il peut y en avoir beaucoup : jusqu’à 200 sur un seul corps ! Et rien (à part le squelette) n’est laissé.

 

L’auteur :

Xinran (son nom de plume), née en 1958 à Pékin,  est une journaliste et écrivaine chinoise. Xinran est un pseudonyme signifiant en chinois « volontiers », « de bon cœur ».

 Pendant son enfance, elle souffre de mesures communistes à raison de ses origines bourgeoises : Elle est née dans une famille aisée et fortunée qui sera persécutée pendant la Révolution Culturelle : maison brûlée,  La petite fille, qui souffre de sa « mauvaise origine de classe » est confiée à un orphelinat militaire et est très tôt envoyée avec son frère dans un orphelinat militaire alors que ses parents, jugés réactionnaires, sont emprisonnés pendant sept ans. À l’âge de quinze ans, elle publie son premier poème et choisit d’étudier l’Anglais, les relations internationales, l’informatique et le Droit au département politique de l’armée.

 Dans les années 1980, les autorités chinoises ayant besoin de personnes pour développer la télévision et la radio, elles font appel à des militaires formés pour être journalistes, capables de diriger des émissions de débats tout en évitant les sujets « interdits ». Xinran, qui occupait alors un poste civil à l’université de l’armée depuis douze ans, se présente pour l’un de ces postes, qu’elle décroche en 1989. Commence alors sa carrière de journaliste. Elle devient animatrice de Mots sur la brise nocturne, une émission de radio quotidienne consacrée aux femmes qui connait un véritable succès de 1989 à 1995.

 Devenue journaliste, elle tient pendant une dizaine d’années une émission de radio destinée aux femmes.

 En 1997, elle quitte la Chine pour l’Angleterre. Elle s’établit à Londres et a publié plusieurs livres principalement consacrés au sort des femmes qui sont incitées, en direct, à parler de leurs problèmes personnel, familiaux et même sexuels. Le succès est considérable jusqu’en 1995 malgré l’heure tardive de l’émission ; Xinran voyage alors en Chine et au Tibet, poursuit ses enquêtes mais décide de partir à Londres en 1997.

 Après quelques petits boulots, elle commence à enseigner à l’université de Londres. Elle fait alors venir son fils âgé de dix ans. Auteur d’une chronique bimensuelle sur la Chine pour « The Guardian », elle tient également le rôle de conseiller aux relations avec la Chine pour de grandes corporations telles que la BBC.

En 2002, elle publie son premier livre, « Chinoises », un document stupéfiant sur la condition des femmes en Chine. Il s’agit de récits rassemblées par Xinran qui lui ont été confiés en tant que journaliste ou qui résulte de ses propres observations sur la situation des femmes en Chine. Elle est encouragée par un agent littéraire connu, Toby Eary, qui représentait notamment l’écrivain à succès Amy Tan (« Le Club de la Chance »). Le couple se mariera en 2002.

Ce livre devient un véritable best-seller international, qui confère à Xinran une notoriété mondiale.

Le succès de « Chinoises » est mérité : une grande variété de témoignages qui abordent les différents aspects de la vie des femmes et traitant notamment des persécutions communistes du point de vue des femmes, des avortements forcés et des mariages forcés, le récit d’existences saccagées au nom de l’idéologie ou des traditions, un ton de sympathie sans trop de sentimentalisme, une naïveté (feinte ?) qu’on lui a reproché mais qui montre aussi que comme les intellectuels qui suivent la génération « rééduquée » à la campagne, elle connaissait mal la vie de la Chine rurale.

Elle fonde en 2004 une association d’adoption entre la Chine et d’autres pays appelée « Mother’s Bridge of Love. ».

En 2004, elle publie « Funérailles Célestes » (Philippe Picquier), un livre né aussi d’une rencontre avec une Chinoise, qui passa trente ans dans des régions désolées du Tibet à la recherche de son mari médecin militaire, disparu lors des opérations chinoises au Tibet en 1958. Un livre bien différent sur un choc de cultures, dans des conditions de vie extrêmes.

On a critiqué Xinran pour certaines approximations et pour une approche un peu suffisante (postface de Claude B. Levenson). Mais ce regard est celui d’une majorité de Chinois vis-à-vis du Tibet ou des « minorités nationales » en Chine. Au moins Xinran fait-elle preuve d’admiration pour son héroïne et son parcours exceptionnel.

Pendant deux ans (2003-2005), Xinran écrit des chroniques régulières pour le grand quotidien britannique The Guardian ; Elle les publie dans un livre, qui n’est malheureusement pas traduit, « Ce que les Chinois ne mangent pas ». C’est un bon document qui détaille les efforts de l’auteur pour dissiper les malentendus, souligner les préjugés européens ou chinois et tenter de combler l’ignorance satisfaite des Européens vis à vis de la Chine et de sa culture.

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