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Shimazaki Aki ♦ Le poids des secrets -3 : Tsubame

Le poids des secrets -Tsubame3Tsubame signifie hirondelle en japonais.

Ici le récit est repris par la mère de Yukio connue comme Mariko Kanazawa, mais de son vrai nom Yonhi Kim, nom d’origine coréenne.

 

Car la Corée fut envahie par les japonais en 1919 et des milliers de coréens arrivèrent au Japon à la recherche d’un travail. La mère et l’oncle de Yukio en faisaient partie, alors que dans leur pays ils étaient professeurs, ils acceptèrent des travaux bien moins considérés, mais surtout durent subir l’opprobre des japonais qui étaient farouchement xénophobes. Lors du tremblement de terre de 1923, la mère de Yukio confia son fils au père d’une paroisse chrétienne et partit à la recherche de son frère. Elle ne revint jamais. Mariko  épousera Monsieur Takahashi et aura une belle vie ; sur le tard ils habiteront  avec leur fils et leur belle fille. Le couple a trois enfants et la plus jeune Tsubaki est la préférée de sa grand mère.

 

L’auteur :

Aki ShimazakiAki Shimazaki est une écrivaine québécoise, née en 1954 à Gifu au Japon. Elle a immigré au Canada en 1981 et vit à Montréal depuis 1991. Ses livres ont été traduits en anglais, en japonais, en serbe, en allemand et en hongrois.

Aki a d’abord travaillé au Japon pendant cinq ans comme enseignante d’une école maternelle et a également donné des leçons de grammaire anglaise dans une école du soir. En 1981, elle émigre au Canada où elle passe ses cinq premières années à Vancouver, en travaillant pour une société d’informatique. Après cela, elle part vivre pendant cinq ans à Toronto. À partir de 1991, elle s’installe à Montréal où, en plus de son activité littéraire, elle enseigne le japonais. Ce n’est qu’en 1995, à l’âge de 40 ans, qu’elle commence à apprendre le français par elle-même ainsi que dans ​une école de langue.

L’écrivaine hongroise et suisse Agota Kristof, auteur de la trilogie Le Grand Cahier (1986) a été un modèle particulier d’inspiration et de motivation pour Aki Shimazaki.

 

Le poids des secrets:

– Tsubaki, 1999

– Hamaguri, 2000, prix Ringuet de l’Académie des lettres du Québec

– Tsubame, 2001

– Wasurenagusa, 2002, Prix littéraire Canada-Japon du Conseil des Arts

– Hotaru, 2005, Prix du Gouverneur général 2005

 

Il faut lire les cinq courts volumes d’un seul tenant, dans l’ordre voulu par Azi Shimazaki, pour voir se mettre en place intrigues et caractères tel un puzzle narratif.

L’histoire de cette pentalogie est construite autour de secrets pesant sur plusieurs générations d’une même famille dans le Japon du XXème siècle. Elle nous est contée selon plusieurs points de vue, au rythme des mensonges et des découvertes de chacun.

Le nœud originel, qui ouvre le premier tome « Tsubaki », est la relation amoureuse et incestueuse de Yukiko et Yukio, frère et sœur qui s’ignorent, à l’aube de la catastrophe de Nagasaki. L’on suit la liaison adultère entretenue par M.Horibe, père des deux adolescents, avec la mère de Yukio.

Les romans suivants constituent un retour en arrière, dans les premières années du siècle.

Dans le second tome, la narration adopte le point de vue de Yukio, spectateur impuissant de la tristesse maternelle, enfant illégitime puis amoureux éconduit.

Ensuite c’est l’histoire de sa mère, Mariko Kanazawa née Coréenne et orpheline suite au tremblement de terre de 1923, qui est contée. Jeune fille séduite mais abandonnée à cause des convenances sociales, elle épouse le collègue de son ancien amant.

Manquait une vision pour parachever le tableau, celle de l’époux de Mariko et père adoptif de Yukio. M. Takahashi, homme généreux et aimant, se révèlera lui aussi enferré dans un secret de filiation qu’il ne percera que sur le tard. Il narre l’histoire de sa famille et son amour pour Mariko et son enfant dans le tome 4.

Progressivement, nous revenons à l’époque contemporaine.

Le volume 1 mettait en scène Namiko, fille de Yukiko, découvrant les secrets de sa mère à l’âge adulte via une lettre post-mortem. Le dernier volume instaure également un dialogue entre générations, entre une Mariko mourante et sa petite-fille à la veille de sa vie de femme.

La trame historique japonaise est omniprésente et entre en résonance avec les affres personnels vécus par les personnages : tremblement de terre de 1923, Seconde guerre mondiale, de la politique expansionniste du Japon jusqu’aux désastres des bombes atomiques en passant par les liens avec la Russie. Ces évènements sont aussi prétextes à mettre en scène des réalités sociales : place des femmes, surtout célibataires, des enfants naturels, des étrangers, mariages arrangés, classes sociales.

Le roman trouve aussi toute sa profondeur en mettant en scène la spiritualité japonaise. Le shintoïsme, le bouddhisme et le catholicisme sont explicitement évoqués.

Ainsi la nature est un élément prépondérant de l’œuvre. Elle fait sens dans l’économie du récit : les hirondelles, les fleurs, les coquillages et les lucioles qui donnent leurs noms aux différents volumes sont également des ressorts narratifs. Leur rôle allégorique est plus prégnant. En effet ces éléments sont de véritables leitmotive : ils deviennent des prénoms ou des surnoms, révélant ainsi des personnalités, des scènes se répètent (la cueillette des fleurs dans une nature salvatrice, le jeu des coquillages ne pouvant s’unir parfaitement qu’une fois) créant des liens entre générations. D’une manière générale, la nature et ses éléments fondamentaux scandent les étapes du roman et l’évolution psychique des personnages : cours d’eau, feu des bombes, vent, campagne et forêt. L’utilisation récurrente de termes japonais met en valeur ces thèmes.

 

 

 

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