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… vu par Arlette

Sigurdardottir Yrsa ♦ Succion

Avec  Succion, deuxième volet de la série Freyja et Huldar, Yrsa Sigurðardóttir nous plonge dans une histoire particulièrement sordide, dans le monde de l’enfance. Pédophilie, corruption, vengeance, jeux de pouvoir, folie, carences des institutions.

Les thèmes abordés dans ce roman sont nombreux. Ils mettent en relief des personnages singuliers, souvent « borderline », sans scrupules. Polar aussi haletant qu’imaginatif et sombre sur la société islandaise avec une ambiance glaçante et prenante à souhait, et plus addictif encore.

C’est le second tome de la série Freyja, psychologue pour enfants et Huldar, policier, et la suite du roman ADN mettant en scène Huldar et Freyja. Mais il n’est pas forcément utile de l’avoir lu pour s’y retrouver, les deux affaires étant indépendantes l’une de l’autre

L’enquête qu’ont menée Huldar et Freyja dans le roman ADN ne les a pas épargnés. On les retrouve dans ce roman plutôt mal en point. Freyja n’est plus directrice de la Maisons des enfants et est redevenue une simple assistante sociale. Elle cherche toujours l’âme sœur et doit composer avec son frère incarcéré. Elle jongle entre son attirance et sa répulsion pour Huldar qui lui, a dégringolé au plus bas de l’échelle dans la hiérarchie après les polémiques qui ont entouré sa dernière enquête. Tous ses collègues semblent penser qu’il est contagieux et il doit se contenter des chiens écrasés. Il doit aussi subir la direction humiliante d’Erla, l’inspectrice qu’il dirigeait auparavant. Il se bat pour retrouver sa réputation ternie, mais aussi contre la tentation de l’alcoolisme Tous les deux ne se voient plus, Freyja est toujours fâchée.

Douze ans après le viol et le meurtre d’une petite fille à Hafnarfjördur en 2004, un cylindre est déterré à Reykjavik avec à l’intérieur, des dessins où tous les enfants d’une école avaient dû imaginer comment serait le futur et qu’ils avaient enfouis 10 ans auparavant. Lors de la découverte, ce qui a intrigué le directeur de l’établissement, c’est que sur un des dessins déterré, un des petits garçons dont le père, arrêté pour pédophilie, croupit en prison, y annonce les meurtres, dans 10 ans, de six personnes indiquées par des initiales. Il devient donc urgent de retrouver la trace du bambin d’alors, devenu un adulte.

Cette enquête est confiée à Huldar, un peu comme une punition puisque personne ne semble prendre cela au sérieux. Mais cela lui permet de contacter Freyja, espérant qu’ils se réconcilient, car il doit admettre qu’il l’aime vraiment bien, elle ne ressemble pas aux autres femmes qu’il connaît.

Et comme si une seule affaire ne suffisait pas, le duo va être confronté à une enquête beaucoup plus glauque qui commence par la découverte de deux mains coupées dans un jacuzzi en centre-ville. La tension et la pression vont donc s’accroitre crescendo sur l’équipe de la brigade policière lancée dans une course contre la montre pour arrêter l’hémorragie et découvrir le meurtrier avant qu’il ne fasse de futures victimes. Et lorsque plus tard des enfants trouveront des pieds en jouant dans le jardin, on saura qu’on a affaire à des meurtres en série qui sortent de l’ordinaire.

Pour eux, les deux affaires pourraient bien être liées.

Nos deux protagonistes vont être confrontés au pire de l’espèce humaine : des violeurs sans aucun remords, des victimes devenus des bourreaux de la pire espèce pour lesquels il est difficile de trouver des circonstances atténuantes. Très vite on plonge dans une sombre histoire de vengeance, de pédophilie, où seul compte l’argent, le pouvoir et la réputation. On découvre avec horreur que certains hommes et femmes, de tous milieux sociaux, n’ont aucun état d’âme ni scrupule, prêt à tout pour obtenir argent et pouvoir.

Leurs deux personnages sont très creusés. Ils sont froids et en même temps attachants. Huldar semble aussi perdu dans sa tête que dans sa vie professionnelle. Il en est de même pour Freyja.

Tous deux souffrent d’une grande solitude. Ils ne semblent pas à l’aise l’un en présence de l’autre et pourtant, on comprend qu’ils se ressemblent et qu’ils peuvent se faire du bien mutuellement (psychologiquement, mais peut-être aussi sentimentalement). Ils ont été dégradés par leur direction respective suite à une précédente affaire qui ne s’est pas terminée de la meilleure façon pour eux. Cette situation a eu également pour effet de refroidir leur relation sentimentale même si Huldar ne perd pas espoir de regagner le cœur de son amie.

Un thriller macabre, avec des enfants qui souffrent et des meurtres sanglants, ainsi qu’avec l’hypocrisie d’une société où des gens importants tentent de manipuler la justice.

Même si l’Islande est l’un des pays disposant de l’un des plus faibles taux de criminalité du monde, il faut remarquer que leurs auteurs ont une imagination débordante et comptent beaucoup dans l’univers du polar.

 

L’auteur :

Vilborg Yrsa Sigurðardóttir, née le 24 août 1963 à Reykjavik, est une écrivaine islandaise, auteure de plusieurs romans policiers et ouvrages de littérature d’enfance et de jeunesse.

Elle est titulaire d’une licence en ingénierie civile de l’université d’Islande ainsi que d’une maîtrise dans le même domaine, obtenue en 1997 à l’université Concordia de Montréal.

Yrsa Sigurdardottir exerce toujours son métier d’ingénieur civil. Elle est actuellement responsable technique pour la firme Fjarhitun sur un très gros projet de construction hydro-électrique d’Europe, situé au beau milieu de l’Islande, où les tempêtes hivernales et le blizzard empêchent souvent tout déplacement… Pas étonnant dès lors, qu’elle ait su peindre à merveille l’atmosphère d’un site isolé. Elle mène, en parallèle, une carrière d’auteur, qu’elle débute, en 1998, par la littérature de jeunesse. Un de ses ouvrages est d’ailleurs primé, en 2000, par le département islandais du IBBY (International Board on Books for Young People).

Ses romans sont traduits dans une trentaine de langues dont l’allemand, l’anglais, le danois, le catalan, l’espagnol, l’estonien, le français, le grec, l’italien, le néerlandais, le norvégien, le polonais, le portugais, le roumain, le russe et le suédois, et ont été récompensés par de nombreux prix littéraires dont le Icelandic Crime Fiction Award en 2011 et 2014.

Yrsa est une des auteurs de polars majeurs de la scène littéraire islandaise qui ont récolté de nombreux prix littéraires dans ce pays qui compte quasiment autant d’auteurs que d’habitants.

Elle vit à Reykjavik dans le quartier de Seltjarnarnes avec son mari et ses deux enfants

 

Œuvre :

Série Þóra Guðmundsdóttir

  1. Ultimes rituels – Þriðja táknið (2005) – traduction de l’anglais par Marie de Prémonville.
  1. Bien mal acquis – Sér grefur gröf (2006) – traduction de l’islandais par Catherine Mercy.
  1. Aska (2007)
  2. Auðnin (2008)
  3. Horfðu á mig (2009)
  4. Brakið (2011)

 

Série Freyja et Huldar

  1. ADN – DNA (2014) – traduction de l’islandais par Catherine Mercy.
  1. Succion – Sogið (2015) – traduction de l’islandais par Catherine et Véronique Mercy.
  1. Absolution – Aflausn (2016) – traduction de l’islandais par Catherine et Véronique Mercy.
  1. Le trouGatið (2017) – traduction de l’islandais par Catherine et Véronique Mercy.
  1. Brúðan (2018)
  2. Þögn (2019)

Série The black ice

  • Lok lok og læs (2021)

 

Autres romans

  • Je sais qui tu es– Ég man þig (2010) – traduction de l’anglais par Marie de Prémonville.
  • Indésirable– Kuldi (2012) – traduction de l’islandais par Catherine Mercy.
  • Lygi (2013)
  • Bráðin (2020)

 

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