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… vu par Arlette

Frain Irêne ♦ Marie Curie prend un amant

Marie Curie prend un amantIrène Frain découvre, par hasard, chez un bouquiniste un petit livre « soigneusement relié de percaline gris-bleu ». Est-ce l’un de ces petits livres grivois que ces messieurs cachaient dans leur bibliothèque derrière des ouvrages plus sérieux ou sur la dernière étagère tout en haut? Absolument pas!

Ce livret renfermait deux numéros d’un hebdomadaire datés du 23 et du 30 novembre 1911, fascicules presque entièrement consacrés à des attaques virulentes contre la personne de Marie Curie, cette brillantissime chercheuse, à l’origine avec son époux Pierre, de la découverte du polonium et du radium, découverte récompensée par un Prix Nobel de physique en 1903.

Pourquoi cette vindicte ? Marie Curie, veuve depuis 2 ou 3 ans était depuis quelques mois la maîtresse de Paul Langevin, ami d’Einstein, plus jeune qu’elle, éminent scientifique lui aussi, fidèle parmi les fidèles de Pierre Curie dont il avait été l’élève, puis le disciple.

Ô scandale, Paul Langevin était marié et père de famille. Mal marié certes, avec une harpie, harcelé par sa belle-famille thénardiesque, battu et menacé en permanence, mais marié. Et nous sommes en 1911, date où l’adultère est passible de correctionnelle.

La presse et l’opinion s’enflamment. Procès, duels, publication de lettres volées, l’ouragan médiatique est énorme. Marie manque d’y laisser la vie. Mais surtout elle dérange. Icône de la science mondiale, elle s’apprête à recevoir un second Nobel. Veuve, génie et amoureuse, c’en est trop. Comme le capitaine Dreyfus vingt ans plus tôt, on l’abrutit de calomnies. On va jusqu’à lapider sa maison.

Au plus fort de la tourmente, elle reste fidèle à ses deux passions : Paul l’amant, et Pierre son mari tragiquement disparu. Quel secret les unissait ? Pour le comprendre, Irène Frain a interrogé des archives négligées, des photos méconnues, des lieux inexplorés. Et ressuscité, par-delà le thriller médiatique d’une modernité souvent glaçante, une femme-courage prête à tout risquer pour ceux qu’elle aime.

Irène Frain nous dresse un tableau minutieux de la vie de Marie Curie. Pour se faire, elle a épluché les comptes de Marie, se fiant à eux pour retracer au plus près la vie de ce couple clandestin.

Adoptant un ton sentencieux, monocorde sans doute en harmonie avec celui de ce groupuscule de savants scientifiques plus géniaux les uns que les autres, Irène Frain raconte. Il y avait là : Pierre & Marie CURIE (tous deux Prix Nobel de Physique 1903 et elle, futur prix Nobel de Chimie ; Panthéonisés en 1995) ; Paul LANGEVIN (physicien, philosophe des sciences et pédagogue), Henriette & Jean PERRIN (physicien, chimiste et homme politique, qui deviendra Prix Nobel de Physique 1926, et créera le CNRS), Georges SAGNAC (physicien, découvreur de l’effet qui porte son nom), Émile BOREL (mathématicien, spécialiste de la théorie des fonctions et des probabilités, futur homme politique, député et ministre.) et sa femme, née Marguerite APPELL, (écrivain sous le nom de plume Camille MARBO, Prix Fémina 1913) et enfin André-Louis DEBIERNE (chimiste, découvreur de l’actinium.). Tous intimes de la famille CURIE et qui demeureront les indéfectibles soutiens de Marie.

Quel heureux temps que ce temps-là, où pouvaient se côtoyer quotidiennement de telles lumières ! 4 Prix Nobel (5 si l’on ajoute Irène CURIE âgée de quelques années qui jouait dans leurs jambes) et 4 Panthéonisés pour un groupe restreint d’amis ! (Les cendres de Jean PERRIN et de Paul LANGEVIN ont été transférées au Panthéon le même jour de 1948).

On assiste aux réunions pleines de verves et d’utopies des plus grands scientifiques de France, au milieu d’une France ultra conservatrice. On découvre Marie Curie de l’intérieur, travailleuse acharnée, mue par la soif de découvrir, mère de famille, avec ses moments d’abattements, sa volonté farouche… Le mécanisme machiavélique, mis en œuvre pour lui nuire, est soigneusement décortiqué : les rumeurs, les appuis politiques et scientifiques, les articles de journaux incendiaires qui auraient voulu en faire une nouvelle affaire Dreyfus, son voisinage poussé à la haine…

Marie CURIE et Paul LANGEVIN, auront leur revanche symbolique en 1948 lorsque la petite fille de « la sainte vierge des sciences », Hélène JOLIOT (1927-), épousera Michel LANGEVIN, un petit-fils de Paul.

L’auteur :

Irêne FrainIrène Frain, née Le Pohon, le 22 mai 1950 à Lorient (Morbihan), est une femme de lettres française, romancière, journaliste et historienne. Elle est membre fondateur du Women’s Forum for the Economy and Society qu’elle fonde en 2008.

Elle appartient à une famille de cinq enfants, dont le père, d’abord garçon de ferme devient professeur pour adulte. Sa mère est couturière. En 1967, après avoir étudié au Lycée Dupuy-de-Lôme de Lorient, elle rentre à Khâgne (Nantes).

Elle se marie en 1969.

En 1972, elle obtient l’agrégation de lettres classiques, puis enseigne les lettres classiques dans le secondaire, notamment au Lycée Jacques-Decour à Paris 9ème et au Lycée de Lagny (Seine et Marne). À partir de 1975 le latin à la Sorbonne. Et ce, jusqu’en 1981.

En 1979, parait son premier essai et s’installe dans le Loir et Cher.

Née dans une famille encore très proche du milieu rural et de son dénuement, Irène Frain s’est d’abord signalée par un ouvrage historique publié en 1979 sur l’âge d’or de la Bretagne maritime, « Quand les Bretons peuplaient les mers ».

Elle consacre son premier roman « Le Nabab » (1982) à René Madec, petit mousse breton devenu nabab en Inde. Cette fresque épique de l’Inde du XVIIIe siècle, connaît un succès foudroyant et les romans suivants consacrent le talent d’Irène Frain : sens aigu de l’intrigue, écriture tantôt sèche tantôt flamboyante, don de faire vivre le lecteur en empathie avec ses personnages, humour certain, imagination foisonnante.

En 1984, elle commence une carrière journalistique (Paris-Match, Elle, VSD, L’équipe)

De roman en roman : « Modern Style » (1984), « Désirs » (1986), « Secret de famille » (1989), « Histoire de Lou » (1990), « Devi » (1992), « L’homme fatal » (1995), « Les hommes, etc. » (2003), « Au Royaume des Femmes » (2007), « Les Naufragés de l’île Tromelin » (2009) qui a été récompensé par le Grand Prix de l’Académie de marine, le Grand Prix Palatine du roman historique et le Prix Relay du roman d’évasion, l’intérêt des lecteurs pour ses écrits et l’originalité de sa personne ne s’est jamais démentie.

On note dans l’œuvre d’Irène Frain deux courants profonds : une passion pour les enjeux inhérents à la condition féminine et une prédilection accusée pour l’Orient — les deux se recoupant souvent. Son dernier ouvrage, Beauvoir in love (2012) fondé sur une enquête aux États-Unis et à l’Université de Columbus, Ohio, a éclairé un pan mal connu de la passion du Castor pour l’écrivain américain Nelson Algren. Elle a ainsi pu mettre en scène des épisodes inconnus du parcours de Beauvoir et éclairer des traits de sa psychologie jusqu’ici ignorés, retouchant ainsi le portrait souvent biaisé, voire négatif que Beauvoir fit de son amant américain après leur rupture. Elle y souligne aussi le rôle d’Algren dans la genèse du Deuxième Sexe. Grande voyageuse, la romancière attribue son goût de l’Asie à sa naissance à Lorient, ancien port de la Compagnie des Indes, autrefois orthographié L’Orient.

Plusieurs de ses récits de voyage illustrent cette prédilection : « Quai des Indes » (1992) son enquête sur la célèbre femme-bandit indienne Phoolan Devi, « La vallée des hommes perdus » (1995), en collaboration avec le dessinateur de BD André Juillard, « Pour que refleurisse le monde » (2002) avec Jetsun Pema, sœur du Dalaï-lama, et, après son voyage en Chine et au Tibet avec son mari, sur les traces du célèbre explorateur américain Joseph Rock, « Au Royaume des femmes » (2006) et « À la recherche du Royaume » (2007) inspiré par la longue enquête d’Irène sur Joseph Rock, avec des photos de François Frain. Elle soutient depuis l’association Aide à l’Enfance Tibétaine.

En octobre de la même année, elle publie chez Timée un album illustré  » Gandhi » où elle retrace le parcours du Mahatma, avec des images d’archives souvent inédites.

Sa passion de l’enquête peut aussi se manifester dans « La Guirlande de Julie » (1991) sur la naissance du langage des fleurs et de la civilité amoureuse en France, « L’Inimitable » (1998) biographie historique de Cléopâtre, « Gandhi, la liberté en marche » (2007) ou « La Forêt des 29 » (2011), qui relate le parcours de Jamboji, fondateur de la communauté des Bishnoïs.

Admiratrice de Julien Gracq, Irène Frain lui a consacré en 2001 un court essai : « Julien Gracq et la Bretagne ».

On note aussi son intérêt pour l’art de vivre : « Le bonheur de faire l’amour dans sa cuisine et vice-versa » (2004) et, dès le début de son parcours, un goût affirmé pour les contes : « Contes du Cheval bleu les jours de grand vent » (1980), republié et réaménagé sous le titre « Le Navire de l’homme triste et autres contes marins » (2010) « La Fée Chocolat » (1995) « Le Roi des Chats » (1996).

Irène Frain a relaté une partie de son enfance bretonne dans « La côte d’amour » (2001) avec des photos de Christian Renaut et « Dans La maison de la source » (2000).

En 2008, Irène continue son action d’ambassadrice en faveur de l’enfance tibétaine au sein de l’association “Aide à l’enfance tibétaine” (AET)  dont la présidente d’honneur est jetsun Pema, soeur de Sa Sainteté le Dalaï-lama.

Elle poursuit bien sûr son engagement en faveur du bon et vrai chocolat au Club des Croqueurs de chocolat, notamment au sein de son Conseil d’administration. Elle vient de relater la légendaire fondation du Club sur le site du Club: www.croqueurschocolat.com/

En 2010, Irène est faite Officier de la Légion d’honneur.

Elle se retire en Bretagne ou en Loir-et-Cher pour écrire son prochain roman  » La Forêt des 29″, et réadapter un recueil de contes  » Le Navire de l’Homme triste et autres contes marins » qui paraît à la mi-novembre.

Parallèlement, elle poursuit sa galerie de portraits dans Paris-Match. Après Laetitia Casta, celui du couturier Giorgio Armani, qu’elle suit de Milan à Dubai pendant plusieurs semaines, est l’un des plus remarqués.

En février 2011, elle publie son 29ème roman «  La Forêt des 29 » dans lequel elle met en scène sous forme de docu-fiction l’itinéraire de Jamboji, fondateur au XVe siècle de la communauté Bishnoï en Inde. Elle y reconstitue également le massacre-immolation qui eut lieu en 1730 à Khejarli, près de Jodhpur. 363 hommes, femmes et enfants y donnèrent leur vie pour protéger les arbres d’une forêt appartenant à la paysanne Bishnoï Amrita Devi.

Elle est membre du Comité d’honneur de l’ADMD (Association pour le Droit de Mourir dans la Dignité).  Certaines de ses actions sont considérées comme militantes pour le Tibet.

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