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… vu par Arlette

Doerr Anthony ♦ Toute la lumière que nous ne pouvons voir

Toute la lumière que nous ne pouvons voirAnthony Doerr nous propose de suivre le destin croisé de deux adolescents, d’origines différentes et de milieux différents, du Paris de l’Occupation à l’effervescence de la Libération.

Paris, 1934. Marie-Laure Leblanc et Werner Pfennig ne se connaissent pas.

Marie Laure est une jeune française aveugle, vivant seule avec son père conservateur au musée d’histoire naturelle de Paris. Elle est devenue aveugle à 6 ans à la suite d’une cataracte. Son père, serrurier du Muséum national d’histoire naturelle, trouve d’ingénieux moyens de la rendre indépendante, notamment en construisant un modèle réduit de leur quartier afin qu’elle s’y repère. Passionnée par les romans d’aventure, elle apprend à lire en braille et commence Vingt mille lieues sous les mers. Un jour, alors qu’elle participait à une visite du musée, elle découvre la légende d’un diamant surnommé « Sea of Flame » en raison de sa couleur bleue et de son centre rouge-feu.

Lorsque les Allemands envahissent Paris en juin 1940, Marie et son père, dépositaire d’un étrange trésor de Musée parisien, quittent la ville pour se réfugier chez son grand-oncle Étienne à Saint-Malo. Mais la guerre va les rattraper, et finir par les séparer. Alors, Étienne, avec sa phobie sociale, et Marie-Laure, avec son handicap, vont être embarqués dans la Résistance.

Werner est un jeune allemand, orphelin sans avenir et qui vit avec sa sœur dans l’orphelinat Zollverein, à Essen. A 8 ans, il découvre le fonctionnement d’une radio, trouvé derrière l’orphelinat. Werner la répare et ils passent avec sa petite sœur Jutta leurs nuits à écouter le programme scientifique pour enfants d’un professeur français.

Il va être remarqué par la Wehrmacht pour ses talents de mécanicien et d’électricien. Petit génie des maths et de la physique, Werner poursuit son rêve de devenir ingénieur dans une école d’élite hitlérienne, mais rapidement, et malgré ses grandes compétences techniques, il est enrôlé pour son talent de télégraphiste dans l’armée allemande, dérivant dans la furie nazie, pistant sans relâche par triangulation des ondes radio les poches de résistance, pour briser la Résistance. Il est envoyé sur le front Est. Chargé de repérer les rebelles russes et ukrainiens diffusant des informations par la radio, il utilise ses compétences scientifiques et techniques pour trianguler leurs positions. En 1944, il est détaché en France avec son unité pour éliminer un résistant introuvable qui transmet depuis la Bretagne les positions allemandes aux Alliés.

Tous les deux finissent par se croiser dans les ruines de Saint-Malo, après le terrible bombardement Allié qui a détruit 80 % de la ville.

De flashback en flashback, on va progressivement découvrir quelle a été la vie des deux adolescents et ce qui les a conduit dans la cité malouine, si éloignée de chez eux… Mais derrière la volonté de fuir la guerre ou de prouver sa valeur à travers des actes de résistance, se cache une quête bien plus grande, qui dépasse l’entendement des deux enfants et qui consiste à soustraire aux allemands un diamant d’une valeur inestimable…

Anthony Doerr nous livre une fresque captivante et parfaitement rythmée sur la base de chapitres alternés, donnant tour à tour le premier rôle à Marie-Laure puis à Werner. Les deux enfants, que l’on voit évoluer et grandir dans des univers complètement différents, se révèlent être des personnages attachants et lumineux qui, malgré un contexte difficile, font preuve d’une humanité et d’une bonté des plus touchantes. En entrecroisant avec une maîtrise éblouissante le destin de ces deux personnages, ennemis malgré eux, dans le décor crépusculaire d’une ville pilonnée par les bombes, Anthony Doerr dessine une fresque d’une beauté envoûtante.

Sans oublier une constellation de personnages secondaires, complexes et attachants : un joaillier allemand déterminé à retrouver un diamant maudit baptisé « Océan de flammes », un adolescent pâlot, passionné par les oiseaux, dont le caractère contemplatif colle mal avec les exigences du Reich, une vieille domestique décidée à résister jusqu’à son dernier souffle…

Bien plus qu’un roman sur la guerre, « Toute la lumière que nous ne pouvons voir » est une réflexion profonde sur le destin et la condition humaine. La preuve que même les heures les plus sombres ne pourront parvenir à détruire la beauté du monde.

Le sujet quant à lui, bien que traité de manière très romanesque, s’avère, grâce à ses descriptions riches et précises, particulièrement intéressant et instructif et parvient à nous passionner pour cet épisode de l’histoire de Saint-Malo. L’écriture par ailleurs est fluide et agréable, faisant du roman un « page turner » pour le moins efficace!

Couronné du prestigieux prix Pulitzer, « Toute la lumière que nous ne pouvons voir » est donc un excellent roman

« La lumière que nous ne pouvons voir, cela renvoie bien sûr aux ondes radio », confie ainsi Anthony Doerr. « Mais avec ce roman, je souhaitais également mettre au jour quelques rares éclats de lumière dans un monde de ténèbres. Je souhaitais montrer que la guerre n’était pas que ces défilés et ces batailles en noir et blanc, mais une multitude d’histoires minuscules, invisibles, qui méritent d’être racontées. »  Anthony Doerr

L’auteur :

Anthony DoerrAnthony Doerr, né le 27 octobre 1973 à Cleveland dans l’Ohio, est un écrivain américain.

Fils d’une professeure de sciences de l’Ohio, Anthony Doerr fut, lui aussi, un enfant prodige, enthousiaste devant le spectacle toujours renouvelé de la nature. « Je connaissais les noms des animaux et des plantes. Le monde était ma salle de classe. Ma mère m’a appris aussi que les sciences et les livres allaient main dans la main. Qu’on pouvait avoir la même curiosité pour les innovations techniques que pour les œuvres de Melville et de Flaubert. »

Lecteur passionné, disciple avoué de Cormac McCarthy, Anthony Doerr sait gré au destin des cadeaux qu’il lui a faits – comme l’obtention du prix de Rome, qui lui a permis de passer un an à l’Académie américaine, sur les hauteurs du Janicule, où il a noirci les premières pages de son grand œuvre.

Il a étudié à  »University School » et plus tard, en 1995, il a été promu à Bowdoin College à Brunswick, Maine.

Diplômé en histoire au Bowdoin College, il est titulaire d’un MFA à l’université d’État de Bowling Green (Ohio).

Aujourd’hui installé à Boise dans l’Idaho avec sa femme et ses fils jumeaux, ce quadra au physique sec goûte les plaisirs de cette terre de montagnes et d’espaces sauvages, où ont encore cours « les rêves sans fin de l’enfance ».

Son roman Toute la lumière que nous ne pouvons voir, figurant sur la New York Times Best Seller list, lui vaut le prix Pulitzer en 2015.

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