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… vu par Arlette

Delacourt grégoire ♦ On ne voyait que le bonheur

On ne voyait que le bonheurAntoine, un expert en assurances, spécialiste dans l’évaluation de la vie des autres. Il passe son temps à traquer les fraudes dans les déclarations aux assurances. Il est payé pour rembourser le moins possible.

Il pense la vie en sommes et très vite, en vient à évaluer la vie d’un homme. « Entre trente et quarante mille euros si vous vous faites écraser. Vingt, vingt-cinq mille si vous êtes un enfant. Un peu plus de cent mille si vous êtes dans un avion qui vous écrabouille avec deux cent vingt-sept autres vies ».

À force d’estimer, d’indemniser la vie des autres, l’assureur va s’intéresser à la valeur de la sienne et nous emmener dans les territoires les plus intimes de notre humanité. Construit en forme de triptyque, « On ne voyait que le bonheur » se déroule dans le nord de la France, puis sur la côte ouest du Mexique. Le dernier tableau s’affranchit de la géographie et nous plonge dans le monde dangereux de l’adolescence, qui abrite pourtant les plus grandes promesses.

Il a deux enfants, Joséphine et Léon, Nathalie leur maman est partie. Antoine se débat seul entre son métier, un père atteint d’un cancer en phase terminale et une sœur qui ne prononce qu’un mot sur deux.

L’histoire d’Antoine est marquée par le manque d’amour, l’abandon de sa mère d’abord, puis de sa femme par la suite, et par la lâcheté, celle de son père qui est toujours resté en retrait, qui n’a jamais rien fait pour recoller les morceaux d’une famille brisée par un drame. Une lâcheté et un manque d’amour qui semblent se transmettre de génération en génération dans la famille, puisque Antoine en digne successeur de son père n’a pas su avoir le courage nécessaire pour sauver son couple et préserver ses enfants.

Dans la première partie, ce sont des tranches de vie qu’Antoine nous raconte, mêlant présent et passé. Il s’adresse à son fils de 8 ans, Léon, et lui parle de son enfance, de sa famille, de son rapport à son père et du manque de sa mère, et de l’image que le miroir lui renvoie, pas glorieuse. Il se décrit comme lâche, un anti-héros, abandonné par sa mère, puis par sa femme (la mère de ses enfants), mal aimé (voir pas aimé) par son père. Et de l’héritage de son père : la lâcheté, la honte de soi.

La deuxième partie c’est l’après drame. On retrouve Antoine seul au Mexique, après 3 ans d’internement psychiatrique. On pourrait dire seul au monde. En voulant se tuer et tuer ses enfants, Antoine a voulu faire cesser la malédiction. « J’avais voulu que nos lâchetés cessent, que mes héritages s’arrêtent avec moi. ». Au Mexique, c’est une nouvelle vie, faite de résilience qui l’attend.

Dans la troisième partie, nouveau changement de rythme. C’est Joséphine, sa fille adolescente, celle sur laquelle il a tiré, mais qui a survécu – défigurée mais vivante – qui parle. Cette partie prend la forme d’un journal intime dans lequel on suit sa psychothérapie et son chemin vers le pardon.

Une vie bousculée par l’éducation parentale, par l’absence de la mère et de ce père amorphe et couard. Comment se construire sainement lorsqu’on manque d’attention, d’amour?

Après le succès mondial de La liste de mes envies et de La première chose qu’on regarde, Grégoire Delacourt signe sans doute son roman le plus fort, le plus personnel, sur la violence de nos vies et aussi sur le pardon.

L’auteur :

Gregoire DelacourtGrégoire Delacourt est un publicitaire et écrivain français né en 1960 à Valenciennes.
Dans sa jeunesse, il est interne au sein du collège La Providence à Amiens. Il obtient son baccalauréat en 1979, puis commence des études de droit à Grenoble, vite arrêtées.

En 1973, il écrit « J’aimerais sortir avec toi » sur une serviette en papier, à l’adresse d’une certaine Jeanne. C’était un livre en images. Il prend alors son premier « râteau » d’auteur.

En 1978, le jour de ses 18 ans, il publie un article dans Le Monde.

Il devient publicitaire en 1982 et crée en 2004, avec sa femme Dana Philp, sa propre agence de publicité, « Quelle Belle Journée » avec laquelle il signe des contrats avec des grandes marques telles que Sephora, GO Sport, Caudalie, Folio (Gallimard), Taittinger, Crozatier, Directours, Unilever…

Il publie son premier roman en 2010, à l’âge de cinquante ans « L’Écrivain de la famille » (plus de 20 000 exemplaires vendus en grand format, 100.000 en édition de poche), puis « La Liste de mes envies » en 2012 qui devient très vite un bestseller avec plus de 500 000 exemplaires vendus avant sa sortie au Livre de Poche où il dépasse les 600 000 exemplaires.

La Liste de mes envies a fait l’objet d’une adaptation au théâtre jouée par Mikaël Chirinian, mise en scène par Anne Bouvier et produite par Salomé Lelouch, jouée de janvier à mai 2013 au Ciné 13 Théâtre. Puis reprise en Avignon au Off et à nouveau au Ciné 13 Théâtre de septembre 2014 jusqu’au 12 janvier 2015. Cette adaptation vaut à Mikaël Chirinian une nomination aux Molières 2014 dans la catégorie « Seul en scène ». L’adaptation cinématographique, produite par Clémentine Dabadie et Thomas Viguier a été confiée à Didier Le Pêcheur avec Mathilde Seigner, Marc Lavoine et Patrick Chesnais dans les rôles principaux. Le film est sorti en mai 2014 et totalise plus de 440 000 entrées. Ce livre a été récompensé par cinq prix littéraires.

Son troisième roman, « La Première chose qu’on regarde », sort en avril 2013 et, outre un procès avec Scarlett Johansson qui se voit déboutée de toutes ses demandes, mais obtient néanmoins 2500 euros de dommages et intérêts pour atteinte à la vie privée, s’écoule à plus de 150 000 exemplaires.

« On ne voyait que le bonheur », sorti le 20 août 2014, figure sur la première liste du Prix Goncourt.

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