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… vu par Arlette

Ung Loung ♦ D’abord ils ont tué mon père

Loung Ung « D’abord, ils ont tué mon père »

et Pin Yathai « Tu vivras mon fils ».

 Les titres de ces livres, récits autobiographiques, donnent la tonalité émotionnelle de leurs contenus. Ces témoignages nous plongent dans l’enfer de la période « khmers rouges », de la prise du pouvoir le 17 avril 1975 concrétisée par l’entrée dans Phnom Penh, à la survie miraculeuse de Pin Yathay (P.Y.) et de Loung Ung (L.U.) qui arriveront à gagner les camps de réfugiés à la frontière thaïlandaise.

Au travers de ces livres, vous vivrez l’évacuation de Phnom Penh avec le regard de Loung Ung âgée alors de 5 ans ou de Pin Yathay, ingénieur de 31 ans, l’exode, les transferts de villages vers les camps de travail, de villages d’enfants vers les camps militaires. Vous comprendrez la faim, la mort, la haine, l’impossible révolte, l’organisation Kmers rouges (Angkar … )

Au-delà du vécu particulier et du regard de leurs auteurs, ces témoignages se croisent et s’amplifient. Tous deux débutent par la prise du pouvoir et l’exode immédiat qui s’en suivie. L’évacuation des villes sous le prétexte mensonger de bombardements américains est l’acte fondateur du régime khmer rouge, c’est-à-dire la destruction de toute forme de civilisation, khmère comprise. Les populations urbaines formeront le peuple nouveau, les paysans seront eux le peuple ancien sur lequel s’appuiera le régime paranoïaque et sanguinaire de Pol Pot.

Le génocide perpétré au Cambodge par les Khmers rouges a donné lieu à peu de récits. Le livre de Loung Ung répare cette lacune.

Roman :

D'abord ils ont tué mon pèreLoung Ung avait cinq ans lorsque le régime de Pol Pot a pris le pouvoir au Cambodge en avril 1975. Son père était un riche employé du gouvernement, c’est-à-dire une cible privilégiée pour les Khmer rouges.

16 avril 1975 : Loung fête ses cinq ans. À Phnom Phen, elle mène une vie confortable, dans une famille heureuse. Loung est une enfant vive, insouciante, gâtée. Elle raffole des sauterelles grillées et adore son père. Elle vit comme une gamine de son âge.

Loung, ses parents et plusieurs frères et sœurs ont dû quitter leur maison de Phnom Penh, vidée de ses habitants en avril 1975, se mettant en route du jour au lendemain sans destination. Ils ont été contraints de laisser tous leurs biens derrière eux, prétendant être une famille de paysans analphabètes afin d’éviter la capture, et furent finalement envoyés dans un camp de travail.

Après une série de camps de travail, Loung et sa famille devinrent usés par la faim constante et l’épuisement, la peur et la séparation, devant cacher leurs émotions afin d’éviter de paraître faibles. Bientôt, Khouy et Meng, les frères de Loung, ainsi que Keav, sa sœur, furent envoyés dans un autre camp de travail. Keav mourut peu après son arrivée. Par la suite, le père de Loung fut emmené par des Khmers rouges et ne revint jamais, certainement tué. La mère de Loung força cette dernière, sa sœur Chou et son frère restant à fuir. La mère resta seule avec son bébé et ne fut jamais retrouvée, probablement tuée elle aussi. Loung et Chou, trop effrayées à l’idée de se séparer comme on le leur avait demandé, rejoignirent un camp de travail pour enfants, et restèrent ensemble, jusqu’à ce que Loung soit envoyée dans un autre camp afin de devenir enfant soldat.

Voilà, racontée avec des mots simples, l’histoire de la petite Loung et de sa famille, la tragique épopée meurtrière des Khmers rouges au Cambodge. La torture aveugle, la paranoïa, la destruction des familles, la famine et l’humiliation quotidienne. L’idéologie folle de Pol Pot et des Khmers rouges imaginant une société idéale construite sur une seule classe sociale où les artistes, les intellectuels et « tous les porteurs de lunettes » représentaient un danger pour la nation !

Ce témoignage d’une rare force d’évocation – qui offre un troublant parallèle avec les écrits d’Anne Frank dans l’Europe hitlérienne – nous fait plonger, intimement, au jour le jour, au coeur d’une des plus grandes tragédies du XXe siècle.

Avec raison, car la vision d’un enfant sur un monde dominé par l’aveuglement totalitaire – nazi ou communiste – est toujours un moment d’émotion. Leurs deux récits sont sans appel. Loung fut projetée de plein fouet dans cette réalité. Elle participa aux camps de travail, fut enrôlée comme « enfant-soldat », dû mentir sur ses origines, abandonna sa famille. Son père, sa mère et deux de ses sœurs ont péri, « comme deux millions de Cambodgiens, soit près du quart de la population du pays. »

Auteur :

 Tout au long de quatLoung Ungre années de cauchemar, quelle que soit la brutalité des épreuves, Loung Ung s’est toujours raccrochée à un immense amour familial, et n’a cessé de garder espoir pour elle-même et pour ceux qu’elle aime.

 Finalement, après l’invasion du Cambodge par le Vietnam en 1979, soldant ainsi la fin du régime khmer rouge, Loung retrouva ses frères et sœurs, et s’enfuit avec Meng et Eang, la nouvelle femme de Meng, successivement au Vietnam, en Thaïlande puis aux États-Unis.

 Ce « devoir de mémoire » est dédié à ses parents. Malgré ces quatre années tragiques, elle et quatre de ses frères et sœurs s’en sont sortis. Loung vit à présent aux États-Unis. Elle est porte-parole de la Campagne internationale pour l’interdiction des mines antipersonnelles, organisme qui a reçu le prix Nobel de La Paix en 1997.

 La vie de Loung aux États-Unis et son retour au Cambodge, des années plus tard, sont retranscrits dans son second livre, Lucky Child.

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